A5. La présentation de Jésus au temple / Nouveau-Testament
Lc 2,22-38 (les personnages en gras, mot important en italique, lieu en vert, en rouge les clefs du texte, en brun les indications de temps)
22 Quand fut accompli le temps prescrit par la loi de Moïse pour la purification, les parents de Jésus l’amenèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur, 23 selon ce qui est écrit dans la Loi : Tout premier-né de sexe masculin sera consacré au Seigneur.
24 Ils venaient aussi offrir le sacrifice prescrit par la loi du Seigneur : un couple de tourterelles ou deux petites colombes.
25 Or, il y avait à Jérusalem un homme appelé Syméon. C’était un homme juste et religieux, qui attendait la Consolation d’Israël, et l’Esprit Saint était sur lui.
26 Il avait reçu de l’Esprit Saint l’annonce qu’il ne verrait pas la mort avant d’avoir vu le Christ, le Messie du Seigneur.
27 Sous l’action de l’Esprit, Syméon vint au Temple. Au moment où les parents présentaient l’enfant Jésus pour se conformer au rite de la Loi qui le concernait, 28 Syméon reçut l’enfant dans ses bras, et il bénit Dieu en disant :
29 « Maintenant, ô Maître souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix, selon ta parole.
30 Car mes yeux ont vu le salut 31 que tu préparais à la face des peuples :
32 lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël. »
33 Le père et la mère de l’enfant s’étonnaient de ce qui était dit de lui.
34 Syméon les bénit, puis il dit à Marie sa mère : « Voici que cet enfant provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de contradiction 35 – et toi, ton âme sera traversée d’un glaive – : ainsi seront dévoilées les pensées qui viennent du cœur d’un grand nombre. »
36 Il y avait aussi une femme prophète, Anne, fille de Phanuel, de la tribu d’Aser. Elle était très avancée en âge ; après sept ans de mariage, 37 demeurée veuve, elle était arrivée à l’âge de quatre-vingt-quatre ans. Elle ne s’éloignait pas du Temple, servant Dieu jour et nuit dans le jeûne et la prière.
38 Survenant à cette heure même, elle proclamait les louanges de Dieu et parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem.
39 Lorsqu’ils eurent achevé tout ce que prescrivait la loi du Seigneur, ils retournèrent en Galilée, dans leur ville de Nazareth.
40 L’enfant, lui, grandissait et se fortifiait, rempli de sagesse, et la grâce de Dieu était sur lui.
Vocabulaire :
Anne : signifie « grâce » en hébreu. Elle est prophétesse, toute entière consacrée au Seigneur dans le jeûne et la prière.
Nazareth : En hébreu, signifie « le rejeton » ou « le surgeon », tel celui annoncé comme le Messie par le prophète Isaïe (Is 7, 1 ss)
Purification : en vertu de Lévitique 12, les mères juives devaient venir se purifier 40 jours après l’accouchement d’un garçon, soit 33 jours après sa circoncision. Et il leur était demandé également de sacrifier un animal (un agneau, deux pigeons ou deux tourterelles). Voulu sainte, pure et pleine de grâce dès le début des temps, Marie n’avait pas besoin de purification, mais par sa profonde humilité et son dévouement au service, elle obéissait au commandement de la Loi.
La purification de la femme relevant de couches : Comme c’est le cas dans l’antiquité grecque, le sang en lui-même est un facteur de souillure. Ainsi les femmes qui ont leurs règles et à fortiori celles qui viennent d’accoucher sont impures pendant des délais fixés par les lois religieuses. Il leur est interdit, par exemple, de s’approcher des sanctuaires. Comme le montre le texte suivant, il en était de même dans le monde juif : « Quand une femme enfantera et mettra au monde un garçon, elle sera impure pendant sept jours, comme aux jours de son indisposition menstruelle. Le huitième jour, l’enfant sera circoncis ; mais elle restera encore trente-trois jours dans le sang de sa purification [note de l’éditeur : dans le sang et autres impuretés dont elle a à se purifier] ; elle ne touchera aucune chose sainte et elle n’ira point au sanctuaire, jusqu’à ce que les jours de sa purification soient accomplis. Si elle met au monde une fille, elle sera impure pendant deux semaines, comme à son indisposition menstruelle, et elle restera soixante-six jours dans le sang de sa purification. Lorsque les jours de sa purification seront accomplis, pour un fils ou une fille, elle présentera au prêtre, à l’entrée de la tente de réunion, un agneau d’un an en holocauste, et un jeune pigeon ou une tourterelle en sacrifice pour le péché. Le prêtre les offrira devant Yahweh, et fera pour elle l’expiation, et elle sera pure du flux de son sang. Telle est la loi pour la femme qui met au monde soit un fils soit une fille. Si elle n’a pas de quoi se procurer un agneau, qu’elle prenne deux tourterelles ou deux jeunes pigeons, l’un pour l’holocauste, l’autre pour le sacrifice pour le péché ; et le prêtre fera pour elle l’expiation, et elle sera pure. (Lv 12,1-8)
Le rachat du garçon premier-né : La question du rachat du garçon premier-né est abordée par divers textes du Pentateuque (Ex 13,1-16 ; 17, 28-29 ; 24, 19-20, et Nombres 18, 15-19). Le principe est simple : « Tu consacreras à Yahweh tout premier-né, même tout premier-né des animaux qui seront à toi ; les mâles appartiennent à Yahweh. » (Exode 13, 12). Propriété de Yahweh, le premier-né des animaux aussi bien que des hommes devra lui être racheté, par un sacrifice ou de l’argent dans le premier cas, par de l’argent dans le second : « Le premier-né de l’homme […], tu le feras racheter, dès l’âge d’un mois, selon ton estimation, contre cinq sicles d’argent, selon le sicle du sanctuaire, qui est de vingt guéras. » (Nb 18, 16)
Sacrifice : voir purification
Syméon : de l’hébreu shim’ôn, « qui est exaucé ». Caractère du prénom Simeon : -Issu de l’hébreu biblique Shimeone, signifiant » Il a entendu ma souffrance « .
Questions :
1° Quel est le sens de la soumission des parents de Jésus aux lois juives de la purification ?
2° Quel est le sens de la présence d’une part de Syméon et d’autre part d’Anne
3° Quel est le désir de Syméon pourquoi ?
4° Que signifie la contradiction et le glaive annoncé par Syméon ?
Commentaire :
Les parents, en venant présenter Jésus au Temple, obéissent à la loi de Moïse. Le texte de Luc se plaît à le faire remarquer trois fois au début du récit puis une fois à la fin du récit. Jésus comme tout premier-né masculin doit être présenté, « consacré » au Seigneur. La cérémonie elle-même de la Présentation n’est pas décrite. Le texte de Luc s’intéresse surtout à deux personnages qui viennent au Temple : un homme et une femme.
Syméon n’a aucune fonction. Il réside à Jérusalem. « Juste » et « pieux », il possède deux qualités aimées des livres de l’Ancien Testament. La justice consiste à « s’ajuster à Dieu », à suivre sa volonté. La Bible stigmatise les « méchants » ou « impies » qui s’opposent aux justes et aux pieux ; ce sont des « criminels » qui agissent comme si Dieu était aveugle !
Syméon attend la « consolation d’Israël ». « Consolez, consolez mon peuple » disait le prophète Isaïe au nom de Dieu. Le terme de « consolation » est devenu technique et se rapporte au temps espéré où Dieu viendra « consoler » son peuple, c’est-à-dire le sauver, le délivrer. Syméon semble symboliser l’attente des croyants d’Israël en la venue des temps où Dieu consolera son peuple en lui assurant enfin la paix et la prospérité.
Le texte souligne que Syméon vient au Temple voir le « messie » de Dieu. L’enfant est présenté comme un roi, le Messie attendu. Les paroles de Syméon sont prophétiques puisque l’Esprit est sur lui. Elles concernent Jésus identifié au « salut préparé à la face des peuples » et à la « lumière » qui éclaire les autres nations.
Les paroles de Syméon adressées directement à Marie sont dramatiques, avec l’allusion à l’épée, à la division, à la chute… Devant Jésus il faudra ouvertement prendre parti : « Ainsi seront dévoilées les pensées secrètes d’un grand nombre. »
Anne, elle aussi, est « prophète », porte-parole de Dieu. Elle est âgée de 84 ans, c’est dire qu’elle a 7 fois 12 ans. Dans la symbolique biblique des nombres, le chiffre 7 suggère la perfection et le 12 l’universalité. Le lecteur devine ainsi qu’Anne représente parfaitement les croyants de son peuple qui attendent « la délivrance de Jérusalem ».
Le temps de la méditation
Comme tout extrait d’évangile, ce récit, écrit après Pâques, dit la foi de Pâques. L’enfant de Marie, Jésus, est présenté clairement par deux prophètes, un homme et une femme, comme le Messie ou Christ. Il est le salut offert à tous et non seulement à Israël. Cette ouverture à l’universel a demandé du temps pour s’imposer à l’intérieur des premières communautés chrétiennes. Jésus est la lumière qui éclaire les nations païennes, c’est-à-dire les nations autres qu’Israël.
Jésus est aussi la Gloire d’Israël. « Gloire », ce mot dans la tradition biblique évoque le poids, la puissance. Le salut pour tous vient de Jésus qui est d’Israël. Jésus est toujours resté fidèle à son peuple. Il s’est soumis aux obligations de la loi dès sa naissance.
La scène de la Présentation se déroule au Temple de Jérusalem, centre religieux de la nation. Mais Jésus vient pour tous. On devine que Luc rappelle aux communautés qui se trouvent maintenant hors frontières, qu’elles ne peuvent pas oublier tout ce qu’elles doivent au judaïsme. Elles appartiennent au même courant que celui de Syméon et Anne, ces juifs qui depuis longtemps attendaient la venue du roi selon le cœur de Dieu, la venue du Messie.
Ce ne sont pas les prêtres qui accueillent Jésus, alors que la scène se passe au Temple, mais un « juste » (Syméon) et un « prophète » (Anne). Il y a là sans doute une critique adressée à ceux qui parmi les responsables n’ont pas accueilli Jésus, mais surtout il y a l’invitation à être « juste » comme Syméon et à prier comme Anne pour reconnaître en Jésus le Messie de Dieu. Jésus est le Messie mais il le sera par le service, non par la puissance. L’épée évoque la croix.
L’enfant ne reste pas à Jérusalem. C’est à Nazareth en Galilée qu’il recevra sa formation religieuse et professionnelle. Cette indication géographique est peut-être aussi une indication théologique. Tout doit commencer à Jérusalem. Mais il faut bien vite aller dans cette Galilée proche des autres nations. L’Église aussi commencera à Jérusalem mais les chrétiens partiront de cette ville jusqu’aux extrémités de la terre pour porter l’Évangile.
Le temps de la prière
Seigneur Dieu, notre Père, merci pour tous ces justes et ces prophètes qui ont attendu longuement la venue de ton Messie. Façonne en nous un cœur de juste qui sache s’ajuster constamment sur toi. Avec ton Esprit, comme Syméon et Anne, que nous reconnaissions en Jésus le sauveur de tous. Que ton Église reste missionnaire.
Pour continuer : Réflexions bibliques