A2. La naissance de Jésus /  Ancien-Testament

Le buisson ardent – la vocation de Moïse : Ex 2,23 – 3,22:   

La rencontre avec Dieu est au cœur du désir de l’homme. Voir Dieu est l’expérience la plus bouleversante. Sur la trajectoire de l’histoire du salut, d’Israël en quête de son Dieu, ce récit du buisson ardent est central.

2,23 Au cours de cette longue période, le roi d’Égypte meurt. Du fond de leur esclavage, les fils d’Israël gémissent et crient. Du fond de leur esclavage, leur appel monte vers Dieu.

24 Dieu entend leur plainte ; Dieu se souvient de son alliance avec Abraham, Isaac et Jacob.

25 Dieu regarde les fils d’Israël, et Dieu les reconnait.

3,1 Moïse est berger du troupeau de son beau-père Jethro, prêtre de Mâdian. Il mène le troupeau au-delà du désert et parvient à la montagne de Dieu, à l’Horeb.

2 L’ange du Seigneur lui apparait dans la flamme d’un buisson en feu. Moïse regarde : le buisson brûle sans se consumer.

3 Moïse se dit alors : « Je vais faire un détour pour voir cette chose extraordinaire : pourquoi le buisson ne se consume-t-il pas ? »

4 Le Seigneur voit qu’il a fait un détour pour voir, et Dieu l’appelle du milieu du buisson : « Moïse ! Moïse ! » Il dit : « Me voici ! »

5 Dieu dit alors : « N’approche pas d’ici ! Retire les sandales de tes pieds, car le lieu où tu te tiens est une terre sainte ! »

6 Et il déclare : « Je suis le Dieu de ton père, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob. »

Moïse se voile le visage car il craint de porter son regard sur Dieu.

7 Le Seigneur dit : « Je vois, oui, je vois la misère de mon peuple qui est en Égypte, et j’entends ses cris sous les coups des surveillants. Oui, je connais ses souffrances.

8 Je descends pour le délivrer de la main des Égyptiens et le faire monter de ce pays vers un beau et vaste pays, vers un pays, ruisselant de lait et de miel, vers le lieu où vivent le Cananéen, le Hittite, l’Amorite, le Perizzite, le Hivvite et le Jébuséen.

9 Maintenant, le cri des fils d’Israël parvient jusqu’à moi, et je vois l’oppression des Égyptiens envers eux.

10 Maintenant donc, va ! Je t’envoie chez Pharaon : tu fais sortir d’Égypte mon peuple, les fils d’Israël. »

11 Moïse dit à Dieu : « Qui suis-je pour trouver Pharaon, et pour faire sortir d’Égypte les fils d’Israël ? »

12 Dieu lui répond : « Je suis avec toi. Et tel est le signe que c’est moi qui t’envoie : quand tu fais sortir d’Égypte mon peuple, vous rendez un culte à Dieu sur cette montagne. »

13 Moïse répond à Dieu : « Je vais donc trouver les fils d’Israël, et je leur dit : “Le Dieu de vos pères m’envoie vers vous.” Ils vont me demander quel est son nom ; qu’est-ce je leur réponds ? »

14 Dieu dit à Moïse : « Je suis qui je suis. Tu parles ainsi aux fils d’Israël : “Celui qui m’envoie vers vous, c’est : JE-SUIS”. »

15 Dieu dit encore à Moïse : « Tu parles ainsi aux fils d’Israël : “Celui qui m’envoie vers vous, c’est LE SEIGNEUR, le Dieu de vos pères, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob”. C’est là mon nom pour toujours, c’est par lui que vous faites mémoire de moi, d’âge en âge.

16 Va, rassemble les anciens d’Israël. Tu leur diras : “Le Seigneur, le Dieu de vos pères, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, m’est apparu. Il m’a dit : Je vous ai visités et ainsi j’ai vu comment on vous traite en Égypte.

17 J’ai dit : Je vous ferai monter de la misère qui vous accable en Égypte vers le pays du Cananéen, du Hittite, de l’Amorite, du Perizzite, du Hivvite et du Jébuséen, le pays ruisselant de lait et de miel.”

18 Ils écouteront ta voix ; alors tu iras, avec les anciens d’Israël, auprès du roi d’Égypte, et vous lui direz : “Le Seigneur, le Dieu des Hébreux, est venu nous trouver. Et maintenant, laisse-nous aller dans le désert, à trois jours de marche, pour y offrir un sacrifice au Seigneur notre Dieu.”

19 Or, je sais, moi, que le roi d’Égypte ne vous laissera pas partir s’il n’y est pas forcé.

20 Aussi j’étendrai la main, je frapperai l’Égypte par toutes sortes de prodiges que j’accomplirai au milieu d’elle. Après cela, il vous permettra de partir.

21 Je ferai que ce peuple trouve grâce aux yeux des Égyptiens. Aussi, quand vous partirez, vous n’aurez pas les mains vides.

22 Chaque femme demandera à sa voisine et à l’étrangère qui réside en sa maison des objets d’argent, des objets d’or et des manteaux : vous les ferez porter par vos fils et vos filles. Ainsi vous dépouillerez les Égyptiens. »

Vocabulaire

Berger : Le métier le plus courant et habituel du peuple de Dieu. les anciens Israélites (Hébreux) sont un peuple de bergers, une vie rude et difficile. La bonté de Dieu est souvent comparée aux soins attentifs dont un berger entoure son troupeau (cf Ps 22). Jésus accompli cette image, il est le bon berger, il est la porte par laquelle les moutons accèdent à la bergerie (Jn 10).

Brûler sans se consumer : c’est la particularité de ce buisson dans et par lequel Dieu se manifeste. Le feu de l’amour et de la présence de Dieu brûle mais sans consumer, celui (celle) qu’il touche. Une rencontre qui n’anéanti pas l’homme(contrairement à la peur de l’A.T.) mais au contraire l’enrichit, et l’accomplit.

Buisson ardent : c’est ainsi que ce buisson est le plus souvent nommé.

Connaître la souffrance : Il s’agit d’une connaissance profonde, intérieure de tout l’être ; davantage une expérience qu’une intelligence. Dieu expérimente la souffrance du peuple élu.

Craindre Dieu : Dans le langage courant, le mot « craindre » a un sens voisin de « redouter » ou « avoir peur ». Le verbe « craindre » prend un autre sens lorsqu’il a pour complément direct Dieu ou le Seigneur. L’Ange du Seigneur arrête le bras d’Abraham qui va immoler son fils et lui dit : « Ne lui fais rien, car maintenant je sais que tu crains Dieu ». Ce qui est loué par le Seigneur lui-même, c’est ce qu’engendre l’expérience du divin. Devant la grandeur de Dieu, l’homme est à la fois saisit de la distance entre lui et Dieu (le néant de la créature et du péché) et l’immensité de l’amour de Dieu qui s’adresse à lui. Une telle crainte va de pair avec la connaissance du Seigneur (Is 11,2-3). L’homme ne peut que chercher à lui plaire, dans la confiance totale quant à son avenir. C’est l’attitude juste des fils devant celui à qui ils doivent la vie et qui veille sur eux. Dieu « voit » et « pourvoit ». Avec une telle foi, l’homme est délivré de toute autre crainte, il adore et sert le seul Dieu, et l’aime de tout son cœur, de tout son être (Dt 31,12).

Descendre : Dieu descend pour partager la situation du peuple hébreu. Il descendra définitivement par et en Jésus-Christ

Dieu de vos pères : le  Dieu d’abraham, d’Isaac, de Jacob.

Entendre les cris des surveillants : Dieu écoute, voit, sent la situation de l’homme, et de son peuple.

Envoyer: après la rencontre la mission. Moïse est envoyé auprès de son peuple et de Pharaon.

Faire monter : Dieu fait monter son peuple de l’esclavage en Égypte à la terre promise. Descendre – monter sera le double mouvement de Jésus.

Je suis qui je suis : Yahweh. Le tétragramme : quatre lettre hébraïque (en hébreu les voyelles sont un ajout) qui signifient « je suis » ou « je suis qui je suis ». Dieu se caractérise par l’être.

Je suis : une signification du nom de Dieu.

Jethroen arabe « immense », prêtre de Madiân, beau-père de Moïse.

Mâdian Madiân est le fils d’Abraham et Quetura (Gn 25,24). Les madianites sont de grands nomades chameliers, connus pour leurs troupeaux et leur commerce (Gn 37,28.36). Leur territoire serait en Arabie du Nord, à l’est du golfe d’Aquaba.

 Moïseen hébreu : « tiré des eaux », il est le patriarche de la première Pâque, la sortie de l’esclavage d’Égypte, une référence constante dans la Bible (704 fois dans l’A.T. et 95 fois dans le N.T.). Il est le personnage le plus important de l’A.T. recevant la Loi pour le judaïsme, préfigurant Jésus-Christ pour le christianisme et précédant le prophète Mahomet pour l’islam. Moïse est le prophète et le guide qui conduit le peuple hébreu hors d’Égypte, pays où il vivait dans la servitude, après que les dix plaies infligées à l’Égypte ont permis la libération du peuple d’Israël. Fils d’Amram, Moïse est le premier personnage à être nommé « homme de Dieu » dans la Bible. C’est lui qui reçoit de Dieu au mont Sinaï les 10 commandements, la Loi, inscrite sur 2 tables de pierre.

Quel est son nom : Moïse pour se présenter au peuple veut connaître le nom de Dieu, celui qui l’envoie. Nommer (voir le récit de la création Gn 2) est une manière de posséder. Dieu par son nom qui reste énigmatique empêche l’homme de mettre sa main sur lui.

Qui suis-je ? : Moïse s’interroge sur son identité pour montrer l’impossibilité de la mission qui lui est confiée. Il a besoin de l’aide et de l’assistance de Dieu lui-même

Rendre un culte : ce n’est pas le propre du peuple de Dieu. Tous les peuples rendent un culte à leurs dieux. La Pâque (sortie d’Égypte) sera l’origine du culte au Dieu unique.

Retire tes sandales : pour honorer Dieu et sa sainteté, Moïse est invité à enlever ses sandales comme ce sera le cas dans la tente de la rencontre puis dans le Temple de Jérusalem.

Sacré – sainteté : La sainteté est un concept religieux qui s’applique à une série de sujets. Il y a des lieux saints, comme l’endroit du buisson ardent où Dieu se manifeste à Moïse: « [Dieu dit à Moïse]: « N’approche pas d’ici, retire tes sandales de tes pieds car le lieu où tu te tiens est une terre sainte. » » (Ex 3,5); comme le Temple qui est la maison de Dieu et la ville de Jérusalem: « Vous saurez alors que je suis Yahvé, votre Dieu, qui habite à Sion, ma montagne sainte! Jérusalem sera un lieu saint, les étrangers n’y passeront plus. » (Jl 4,17)

Certains objets sont saints, comme les pains consacrés qui sont conservés au sanctuaire et réservés aux prêtres, ou même le butin que l’on prend à l’ennemi au cours de la guerre. Parmi les personnes que l’on considère saintes, il y a les prêtres et Israël: « Israël était une part sainte pour Yahvé, les prémices de sa récolte. » (Jr 2,3) Certains temps sont saints ou sacrés, tel le sabbat ou les grandes fêtes: « Moïse dit aux enfants d’Israël: « Voici ce qu’a dit Yahvé: Demain est un jour de repos, un saint sabbat pour Yahvé… » » (Ex 16,23) Enfin le saint par excellence est Yahvé lui-même et tout ce qui lui appartient, comme son nom, son bras, l’arche d’alliance: « Notre âme attend Yahvé, notre secours et bouclier, c’est lui; en lui, la joie de notre coeur, en son nom de sainteté notre foi. » (Ps 33,20-21).

La notion de sainteté est étroitement liée à celle du sacré. Dans les traditions théologiques les plus anciennes de la Bible, la sainteté n’est pas un concept abstrait. Elle est toujours mise en rapport avec la présence ou la manifestation de Yahvé. Au moment de la manifestation de Dieu sur le Sinaï, Moïse doit accomplir certains rites de purification pour mettre le peuple en état de rencontrer Dieu: « Yahvé dit à Moïse: « Va trouver le peuple et fais-le se sanctifier aujourd’hui et demain; qu’ils lavent leurs vêtements et se tiennent prêts pour après-demain, car après-demain Yahvé descendra aux yeux de tout le peuple sur la montagne du Sinaï. » » (Ex 19,10-11) On remarque que la sainteté de Dieu s’étend à tout ce qui lui appartient ou à tout endroit où Israël fait la rencontre de Dieu.

Ce sentiment d’appartenance à Yahvé sera mis davantage en évidence par les prophètes. Puisqu’Israël est le peuple qui appartient à Yahvé, il est appelé à la sainteté. La sainteté prend petit à petit une valeur morale. L’être humain, marqué par la fragilité de sa condition, est appelé à la conversion pour vivre une relation étroite de communion avec Yahvé. Cette sainteté morale se traduit par la recherche de la justice qui est conformité et fidélité à la volonté de Dieu. C’est ainsi que le prophète Isaïe, au moment de sa vocation, éprouve fortement sa condition de pécheur, parce qu’il se sent solidaire d’un peuple infidèle aux exigences de l’Alliance. Devant la manifestation du Dieu trois fois saint, Isaïe s’écrie: « Malheur à moi, je suis perdu! car je suis un homme aux lèvres impures, j’habite au sein d’un peuple aux lèvres impures, et mes yeux ont vu le Roi, Yahvé Sabaot. » (Es 6,1-5). La Loi de sainteté qui date de l’époque des prophètes et qui est contenue dans le livre du Lévitique, insiste sur la sainteté de Yahvé et les exigences que cela implique pour Israël: « Oui, c’est moi Yahvé qui vous ai fait monter du pays d’Égypte pour être votre Dieu: vous serez donc saints parce que je suis saint. » (Lv 11,45)

On aura reconnu que cet appel à la sainteté sera repris par Jésus, dans le cadre du discours sur la montagne, en des formules qui nous font voir en quoi consiste la sainteté chrétienne: « Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père du ciel est parfait » (Mt 5,48) et: « Montrez-vous miséricordieux, comme votre Père est miséricordieux » (Lc 6,36). À l’exemple de Jésus qui est reconnu comme le Saint de Dieu, ses disciples sont appelés à la sainteté car ils appartiennent à Dieu. Dans la pensée de saint Paul, la recherche de la sainteté signifie que le disciple de Jésus veut correspondre, par sa foi et sa manière de vivre, à son identité d’enfant de Dieu, de membre du Corps du Christ, de temple de l’Esprit Saint.

Signe : Dieu marque Caïn d’un signe, sans préciser lequel, qui le protège de toute agression ou vengeance à cause de son acte meurtrier. Le signe de la croix reprend à la fois cette protection et lui donne le nouveau sens de l’appartenance à la communauté chrétienne. Ici il y d’abord le signe du buisson qui brûle sans se consumer et l’annonce du signe que sera le culte (l’offrande) que le peuple offrira à Dieu après la sortie de l’esclavage d’Egypte.

Terre sainte : terre (adamah en hébreu d’où vient le nom d’Adam) sainte (en hébreu qodesh) apparaît à partir du livre de l’Exode. La sainteté est en lien avec Dieu, avec la tente de la rencontre et signifie une des caractéristiques de Dieu.

Voiler son visage : ou cacher le visage le visage, à cause de la grandeur de Dieu et l’impossibilité de voir Dieu face à face sans mourir. Dieu se dévoile en se voilant (ange, feu, …) l’homme se voile pour dévoiler la face de Dieu.

Voir la misère de mon peuple : Dieu entend, voit, reconnaît la misère de son peuple. Tout le contraire des dieux impassible des païens.

Voir Dieu : face à face, tel est le désir qui habite le cœur de l’homme. Il devra attendre la venue du Fils de Dieu, pour voir son visage. Aujourd’hui Dieu se donne à voir (dévoile) dans la petitesse de l’hostie (le corps du Christ) et sa présence en chaque homme et femme, que nous reconnaissons comme notre sœur et notre frère, à cause de Jésus-Christ.

Questions :

1° Comment Dieu se manifeste à Moïse ? Pourquoi ? Quel sens a le feu ? le buisson qui ne se consume pas ?

2° Comment Dieu se présente à Moïse ? Qui est-il selon lui-même ? Pourquoi ?

3° Que doit faire Moïse face au buisson ardent ? Pourquoi ?

4° Après la rencontre et la manifestation de Dieu, la mission : quelle mission Dieu confie à Moïse ?

Commentaire : Le Tout-autre qui se fait le Tout-proche :

La finale du chapitre 2 donne le sens de la vocation et de la mission de Moïse : le verbe [zakar], se souvenir, sera la base des rituels de Pâque. Faire mémoire, se souvenir de l’Alliance, du passage de Dieu au milieu de son peuple pour le libérer, tel est le culte à rendre. Dieu a entendu (il n’est pas impassible comme les idoles) les cris de son peuple et il s’est souvenu de son Alliance [beriyth] avec Abraham, Isaac et Jacob. Ainsi la clef est : se souvenir de l’Alliance.

Les récits de vocation dans la Bible fixent le déroulement selon un modèle qui est à peu près toujours le même. Dans les grandes lignes, on retrouve les 5 différents moments suivants (comme dans les schémas d’annonciation) :

1) une mise en présence de Dieu à travers un signe ou un envoyé, un ange : ici le buisson ardent (Ex 3,1-3), la rencontre avec Dieu (Ex 3,4-9) et la révélation du Nom (Ex 3,14)

2) Dieu énonce la vocation et la mission (Ex 3,10-13 ; 15-22)

3) celui qui est appelé formule des objections (Ex 4,10-17)

4) Dieu tient compte de ces objections et précise la mission : signes : (Ex 4,1-9) – précision : (Ex 4,21-24)

5) l’appelé donne son assentiment à Dieu et s’engage Ex (4,18-19)

Dieu se manifeste à nouveau par le feu comme lors de l’Alliance avec Abraham (Gn 15,17) et son sacrifice (Gn 22,6.7). Cette fois l’ange du Seigneur consume le buisson sans le dévorer : le feu brûle le buisson sans le détruire. Si le feu est une donnée courante des manifestations divines, le terme traduit par « flamme » est unique ainsi que le mot traduit par « buisson » (également en Dt 33,16, et en 1 S 14,4).

Les pères ont relu cette particularité du feu comme une préfiguration de la naissance virginale du Christ (voir B1. Naissance de Jésus[1]), ainsi chez Grégoire de Nysse :

Ce passage nous enseigne également le mystère de la Vierge : la lumière de la divinité, qui, à partir d’elle, a éclairé l’humanité, a laissé intact en naissant le buisson dont il émanait et l’enfantement n’a pas flétri la fleur de la virginité.[2]

Ainsi Dieu appelle, comme un feu ; notre cœur devient brûlant, mais il n’anéanti ni notre volonté, ni notre personnalité, ni notre moi, bien au contraire il vient comme l’amplifier et l’accomplir.

Le feu est comme le symbole de cette visite intérieure de Dieu, empreinte ardente et inextinguible qui ne peut laisser indifférent et qui demande une réponse. Le feu à la fois purifie et illumine, double aspect de tout appel et vocation. Moïse qui a tué un égyptien, doit apprendre à laisser Dieu lui-même agir (purification) et il reçoit une mission pour son peuple (illumination).

Moïse intrigué par ce signe surprenant (buisson ardent), s’approche pour mieux voir cette vision. Par ce mot le récit atteste ainsi qu’il s’agit d’une manifestation de Dieu, il passe de l’ange du Seigneur (Ex 3,2) à Dieu lui-même (Ex 3,4) qui l’appelle par son nom. Moïse répond : « me voici ! », comme Abraham (Gn 22,1) et Jacob (Gn 46,2). C’est le schéma habituel qui fait entrer Moïse dans la longue lignée de ceux qui sont appelés par Dieu.

Moïse est invité à garder sa distance et à enlever ses sandales (Ex 3,5), car cette terre est sainte. Geste de respect et d’ouverture à la grandeur du Dieu Tout-Autre, encore bien présent dans l’Islam[3], peu présent dans la Bible où il est davantage signe d’humiliation (Es 20,2-4).

Dieu en se présentant comme le « Dieu de tes pères », situe Moïse dans l’histoire du peuple qui est le sien, de sa famille et dont il semblait totalement détaché : après avoir été adopté par une Égyptienne (Ex 2,5ss), il avait dû fuir vers Mâdian, nouvelle terre d’exil où il s’était marié (Ex 2,15ss). Moïse est donc rendu à lui-même (révélé à lui-même), alors même que Dieu se manifeste à lui.

Moïse voile sa face par crainte de Dieu. Ce mot « crainte », le même pour peur, signifie le sentiment que provoque la sainteté de Dieu : révérence et respect, vénération et adoration. Tout l’A.T. est traversé par cette conviction : voir Dieu c’est mourir ! (P. ex. Ex 3,6 ; 19,21 ; 20,19 ; 33,20.23). La vision sera remplacée par l’écoute, un thème peu présent en Exode mais récurrent dans le Deutéronome.

Alors que pour l’homme il est difficile d’entendre et voir Dieu ; Dieu, lui, a vu la souffrance de son peuple et a entendu les cris provoqués par l’oppression (Ex 3,7), il est le Dieu qui se fait tout proche. Il est tout l’opposé des idoles impassible et incapable de voir et d’entendre (Cf. le veau d’or Ex 32). Il annonce (Ex 3,8) ce qu’il veut réaliser : un double mouvement :

  • « je suis descendu pour délivrer…
  • …le faire monter de ce pays vers un pays où coulent le lait et le miel »

Dieu descend pour faire monter ; Dieu délivre son peuple pour le mener dans le « pays où coulent (ruisselle) le lait et le miel ». Cette expression revient en Nb 13,27 pour décrire le pays que les éclaireurs ont visité et en Deutéronome[4], elle qualifie la terre promise par Dieu.

C’est le double mouvement que Jésus-Christ accomplira par son incarnation et sa rédemption.

Les v. 10-13 reprennent une partie du schéma de vocation :

2) la mission :

  • envoi vers Pharaon
  • faire sortir le peuple(les fils d’Israël) d’Égypte

3) objections : « Qui suis-je ?… »

4) précision : « je serai avec toi » signe : « vous viendrez sur cette montagne servir Dieu »

5) assentiment : « j’irai donc… » et nouvelle objection, qui provoque la révélation du nom de Dieu (Ex 3,14-15).

Dieu révèle son nom à Moïse : YHWH, le tétragramme. C’est un nom hébraïque se composant des quatre lettres yōḏ (a), hē (h), wāw (y), hē (h), de valeur gématrique 26 soit 10 (yōḏ) + 5 (hē) + 6 (wāw) + 5 (hē) = 26.

Souvent présenté comme le « nom propre » de Dieu, ce mot est alors désigné comme « le Tétragramme ». Il s’agit d’une forme issue de la racine trilittérale hyh (HYH) du verbe « être ».

Pour les juifs, ce nom – dont la vocalisation, si elle a existé, n’est pas connue – ne doit pas être prononcé, en vertu du troisième commandement, traduit par : « Tu ne prononceras pas le nom de YHWH en vain… ». En revanche, les chrétiens l’ont parfois transcrit dans les traductions par « Yahvé » (BJ), « Yahweh » ou l’Eternel (Louis Segond, bible protestante). Cependant, depuis le début du 21e s. l’Église catholique préconise de remplacer « YHWH » par l’appellation « le Seigneur » (TOB et BJ nouvelle version).

« Je suis ce que je suis ». Et Dieu dit : « Voici ce que tu diras aux Israélites : [mot à mot] « Je serai qui je serai » (ou, plus métriquement, ”que je sois qui je serai”) (Ehyéh) m’a envoyé vers vous. [5]».

Cette étymologie à partir du verbe être a suscité trois types d’interprétation :

  • JE SUIS QUI JE SUIS, c’est-à-dire : tu ne peux comprendre qui je suis, car je suis trop grand pour être enfermé dans un nom ou défini par des mots. Je ne veux pas ou je ne peux pas dire qui je suis. Si c’est ainsi qu’il faut traduire, cela signifie qu’en fait Dieu refuse de répondre à la question de Moïse. Il laisse planer le mystère. Le nom, pour les Sémites, donne un pouvoir. En évitant de se nommer, Dieu refuserait que l’on ait prise sur lui.
  • JE SUIS CELUI QUI EST, c’est-à-dire : je suis le seul Dieu qui existe vraiment. Les autres dieux n’existent pas. Ils sont néant (voir Es 41,24). C’est la traduction retenue par la version grecque (la septante : LXX). La philosophie chrétienne s’en inspirera pour montrer que Dieu est l’Être, mot lui-même repris à la philosophie grecque (mais cela cadre-t-il vraiment avec la pensée juive ?).
  • JE SUIS QUI JE SERAI, c’est-à-dire : je suis là avec vous de la manière que vous verrez. Vous découvrirez qui je suis en me voyant me manifester à vos côtés au cours des âges. Je suis celui qui vous donne de faire l’expérience de Dieu comme celui qui vous fait exister. L’hébreu, qui ne dispose que d’un seul temps verbal pour exprimer l’inaccompli et le futur, autorise cette traduction qui tient mieux compte du fait que la révélation s’effectue essentiellement dans l’histoire.

Ces trois sens possibles ne sont pas forcément exclusifs l’un de l’autre. Sans doute le caractère énigmatique de la formule a-t-il été voulu par le rédacteur pour marquer l’impossibilité d’enfermer Dieu dans des mots ou des définitions[6].

L’ «être» de Dieu semble orienté vers l’homme. En effet (Ex 3,12), le Seigneur affirme « Je suis avec toi », promettant ainsi que sa présence aux hommes sera constante et efficace. Et derrière ces deux aspects, ce Nom laisse entendre que Dieu est aussi Celui qui fait exister, qui décide de l’être.

Nous pouvons relire ce récit de la vocation de Moïse comme une préfiguration de l’envoi de Jésus-Christ. Il est descendu (incarnation) pour révéler le vrai visage de Dieu (vision) et il est monté (rédemption) pour sauver (délivrer) l’homme pécheur. Jésus reprend le nom de Dieu, en particuliers dans l’évangile de Jean : « je suis ».

[2] GREGOIRE DE NYSSE, La vie de Moïse, II,20-22, p. 117-119. SC 1, Paris, Cerf, 2000, 3e édition.

[3] Nos frères musulmans ôtent toujours leurs chaussures en entrant dans une mosquée. Comme les catholiques qui font une génuflexion et un signe de croix à l’entrée d’une église.

[4] Dt 6,3 ; 11,9 ; 26,9.15 ; 27,3 ; 31,20.

[5] Traduction de la Bible de Jérusalem (BJ), L’expression est rendue par « Je suis celui qui suis » dans la traduction due à Louis Segond et par « Je suis qui je serai » dans la TOB. La Bible du Rabbinat traduit par « Être invariable ». Voir http://fr.wikipedia.org/wiki/YHWH

[6] Charles Delhez et Jean Radermakers, Apprendre à lire la Bible, Fidélité, Namur, 2007, p 112.

Le choix de la tribu de Lévi comme prêtre dans la Tente du Rendez-vous

Nb 17,1-8 :   

Yahvé parla à Moïse et dit :« Parle aux Israélites. Qu’ils te remettent, pour chaque famille, un rameau ; que tous leurs chefs, pour leurs familles, te remettent douze rameaux. Tu écriras le nom de chacun sur son rameau ;et sur le rameau de Lévi tu écriras le nom d’Aaron, car il y aura un rameau pour le chef des familles de Lévi.Tu les déposeras ensuite dans la Tente du Rendez-vous, devant le Témoignage où je me rencontre avec toi.5L’homme dont le rameau bourgeonnera sera celui que je choisis ; ainsi je ne laisserai pas monter jusqu’à moi les murmures que les Israélites profèrent contre vous. »Moïse parla aux Israélites, et tous leurs princes lui remirent chacun un rameau, douze rameaux pour l’ensemble de leurs familles patriarcales ; parmi eux était le rameau d’Aaron. Moïse les déposa devant Yahvé dans la Tente du TémoignageLe lendemain, quand Moïse vint à la Tente du Témoignage, le rameau d’Aaron, pour la maison de Lévi, avait bourgeonné : des bourgeons avaient éclos, des fleurs s’étaient épanouies et des amandes avaient mûri.Moïse reprit tous les rameaux de devant Yahvé et les apporta à tous les Israélites ; ils constatèrent, et chacun reprit son rameau.Yahvé dit alors à Moïse : « Remets le rameau d’Aaron devant le Témoignage où il aura sa place rituelle, comme un signe pour ces rebelles. Il réduira à néant leurs murmures qui ne monteront plus jusqu’à moi, et eux ne mourront pas. »Moïse fit comme Yahvé le lui avait ordonné. Il fit ainsi.

Vocabulaire :

 

Questions :

 

 

Commentaire :

Le bâton est un signe d’autorité, ainsi chaque tribu en remettant son bâton devant l’arche d’Alliance, se soumet à l’autorité de Dieu.

Le bâton qui fleurit et porte du fruit en l’espace d’une nuit est un miracle, qui montre l’action et le choix de Dieu.

C’est Dieu lui-même qui choisit la tribu de Lévi, par Aaron, comme celle qui s’occupera de la tente de la rencontre et donc de l’arche d’Alliance et des sacrifices.

Autre lien : la naissance de Samuel

Elcana avait deux femmes, Peninna, qui lui a donné des enfants et Anne qui n’en avait pas. Chaque année ils montaient ensemble au temple de Silo. Elcana remettait une double part de sacrifice à Anne qui était sa préférée. Lors d’une de ces visites à Silo Anne pleura abondamment, elle priait Dieu de lui donner un fils et promis de le donner toute sa vie à Dieu. Eli le prêtre la surpris pensant qu’elle était ivre.

15 Anne répondit : « Non, mon seigneur, je ne suis qu’une femme affligée, je n’ai bu ni vin… 16 c’est l’excès de mon chagrin … qui m’a fait prier aussi longtemps. » 17 Éli lui répondit : « Va en paix, et que le Dieu d’Israël t’accorde ce que tu lui as demandé ». 18 Anne dit alors : « Que ta servante trouve grâce devant toi ! »

Vocabulaire :

 

Questions :

 

Commentaire :

 

Isaïe : Es 9,5 : Oui, un enfant nous est né, un fils nous a été donné ! Sur son épaule est le signe du pouvoir ; son nom est proclamé : « Conseiller-merveilleux, Dieu-Fort, Père-à-jamais, Prince-de-la-Paix ».

Michée : Mi 5,1 : Et toi, Bethléem Éphrata, le plus petit des clans de Juda, c’est de toi que sortira pour moi celui qui doit gouverner Israël. Ses origines remontent aux temps anciens, aux jours d’autrefois.

Daniel : Dn 2,34 : Tu étais en train de regarder : soudain une pierre se détacha d’une montagne, sans qu’on y ait touché ; elle vint frapper les pieds de fer et d’argile de la statue et les pulvérisa.

Habaquc : Ha 3,2 : Seigneur, j’ai entendu parler de toi ; devant ton œuvre, Seigneur, j’ai craint !

Elcana avait deux femmes, Peninna, qui lui a donné des enfants et Anne qui n’en avait pas. Chaque année ils montaient ensemble au temple de Silo. Elcana remettait une double part de sacrifice à Anne qui était sa préférée. Lors d’une de ces visites à Silo Anne pleura abondamment, elle priait Dieu de lui donner un fils et promis de le donner toute sa vie à Dieu. Eli le prêtre la surpris pensant qu’elle était ivre.

15 Anne répondit : « Non, mon seigneur, je ne suis qu’une femme affligée, je n’ai bu ni vin… 16 c’est l’excès de mon chagrin … qui m’a fait prier aussi longtemps. » 17 Éli lui répondit : « Va en paix, et que le Dieu d’Israël t’accorde ce que tu lui as demandé ». 18 Anne dit alors : « Que ta servante trouve grâce devant toi ! »