B13. Repas chez le pharisien – Repentir de M.-Madeleine / Bible Ancien-Testament
Le repentir et la guérison de Myriam
Nb 12,1-15 :
1 Parce que Moïse avait épousé une femme éthiopienne, sa sœur Miryam et son frère Aaron se mirent à le critiquer.
2 Ils disaient : « Le Seigneur parle-t-il uniquement par Moïse ? Ne parle-t-il pas aussi par nous ? » Le Seigneur entendit.
3 – Or, Moïse était très humble, l’homme le plus humble que la terre ait porté.
4 Soudain, le Seigneur dit à Moïse, à Aaron et à Miryam : « Sortez tous les trois pour aller à la tente de la Rencontre. » Ils sortirent tous les trois.
5 Le Seigneur descendit dans la colonne de nuée et s’arrêta à l’entrée de la Tente. Il appela Aaron et Miryam ; tous deux s’avancèrent, et il leur dit :
6 « Écoutez bien mes paroles : Quand il y a parmi vous un prophète du Seigneur, je me fais connaître à lui dans une vision, je lui parle dans un songe.
7 Il n’en est pas ainsi pour mon serviteur Moïse, lui qui, dans toute ma maison, est digne de confiance :
8 c’est de vive voix que je lui parle, dans une vision claire et non pas en énigmes ; ce qu’il regarde, c’est la forme même du Seigneur. Pourquoi avez-vous osé critiquer mon serviteur Moïse ? »
9 La colère du Seigneur s’enflamma contre eux, puis il s’en alla.
10 La nuée s’éloigna de la tente, et voici : Miryam était couverte d’une lèpre blanche comme de la neige. Aaron se tourna vers elle, et voici qu’elle était lépreuse.
11 Il dit alors à Moïse : « Je t’en supplie, mon seigneur, ne fais pas retomber sur nous ce péché que nous avons eu la folie de commettre.
12 Que Miryam ne soit pas comme l’enfant mort-né dont la chair est à demi rongée lorsqu’il sort du sein de sa mère ! »
13 Moïse cria vers le Seigneur : « Dieu, je t’en prie, guéris-la ! »
14 Mais le Seigneur dit à Moïse : « Si son père lui crachait au visage, n’aurait-elle pas honte pendant sept jours ? Qu’elle soit donc exclue du camp pendant sept jours ; après quoi, elle sera réintégrée. »
15 Miryam fut donc exclue du camp pendant sept jours, et le peuple ne leva pas le camp avant qu’elle ne soit réintégrée.
Vocabulaire :
colonne de nuée : c’est la même présence de Dieu que lors de la sortie d’Égypte.
tente de la rencontre : c’est la tente assignée à Dieu
lèpre blanche comme la neige : la lèpre est associée au péché et conduit à l’exclusion de la communauté humaine et religieuse.
oser critiquer : (pas craint de parler contre Moïse). Parler contre Moïse c’est comme parler contre Dieu.
péché : présent dès la genèse.
exclue : (enfermée en dehors du camp) pendant 7 jours en signe de purification
réintégrée : (rassembler) réunie à nouveau à la communauté.
Questions :
Quelle est la manière différente d’agir de Dieu envers Moïse et Aaron – Myriam ?
Quel est le péché commis par Myriam et Aaron ?
Commentaire :
Miryam est la sœur aînée de Moïse. On entend très rarement mentionner son existence. Pourtant c’est elle qui a permis que Moïse soit sauvé. Quand sa mère s’est décidée à déposer son bébé de trois mois sur l’eau, il est écrit que sa sœur veillait plus loin pour savoir ce qu’on lui ferait (Ex 2,4). Elle était rusée et déterminée cette petite Miryam qui devint une grande Miryam. Elle va jusqu’à proposer à la princesse qui trouve l’enfant de lui chercher une nourrice chez les Hébreux, et ce sera sa mère biologique.
C’est une femme au franc-parler qui prend la parole et ose intervenir avec Aaron pour contester un choix de Moïse (Nb 12,2). Elle se retrouve avec la lèpre après cette contestation. Mais, événement significatif, son peuple ne veut pas repartir sans elle. On l’aimait beaucoup : le peuple n’a pas repris sa marche avant qu’elle ne soit guérie et ait réintégré la communauté.
Avant d’être contre Moïse, Miryam, la sœur aînée de Moïse a permis que Moïse soit sauvé. Quand sa mère Yokèvèd s’est décidée à déposer son bébé de trois mois sur l’eau, il est écrit que sa sœur veillait plus loin pour savoir ce qu’on lui ferait (Ex 2,4). Elle était rusée et déterminée cette petite Miryam qui devint une grande Miryam. Elle va jusqu’à proposer à la princesse qui le trouve de lui chercher une nourrice chez les Hébreux, nourrice qui sera sa mère biologique, Yokèvèd.
Par le peuple elle est considérée comme un prophète, amenant la joie. On la mentionne dans la généalogie (Mi 6,4; 1 Ch 5,29; Nb 26,59), ce qui est exceptionnel dans le contexte d’une société patriarcale. C’est elle qui entonne l’hymne de victoire à la sortie d’Egypte.
Miryam est une rassembleuse, une meneuse, une semeuse de joie et d’espoir. Et le peuple le reconnaît. Après la traversée de la mer Rouge, elle prend un tambourin dans sa main et entraîne les femmes derrière elle pour une danse au rythme d’un chant de louange :
Chantez pour Yhwh,
Car pour triompher il a triomphé,
Cheval et cavalier, il flanque à la mer. » (Ex 15,20-21)
Les critiques de Myriam et Aaron ne sont-elles pas en partie justifiées ? Mais seule Myriam va être punie, Aaron échappant à la justice divine. Miryam se retrouve blanche comme neige par les « bons » soins du Seigneur. Mais qu’a-t-elle donc fait pour se mériter ainsi les foudres divines ? Oh, elle s’est permis une critique contre son frère Moïse parce qu’il a épousé une femme étrangère. Partageait-elle ici cette méfiance assez répandue dans la Bible à l’endroit des femmes étrangères, perçues comme des ferments d’idolâtrie pouvant contaminer leurs époux? Ou bien avait-elle juste voulu placer son frère devant ses propres incohérences? C’est qu’ailleurs , il ordonne à ses coreligionnaires de ne pas contracter de mariage avec les femmes des autres nations (Dt 7,3-4). Et puis, pourquoi son frère Aaron, qui s’est solidarisé de sa critique, échappe-t-il pour sa part à la colère divine? Un examen plus attentif du texte s’impose pour éclaircir l’affaire.
En fait, Miryam et Aaron se sentent victimes d’une injustice et ils le manifestent : « Le Seigneur ne parlerait-il donc qu’à Moïse? N’a-t-il pas parlé à nous aussi? » (v. 2). Les deux comparses semblent croire que si Moïse se permet certaines libertés, c’est parce qu’il se perçoit comme ayant un statut à part de par le fait que le Seigneur lui parle.
En tout cas, si ce dernier parle, il entend également! Et en réaction à ce qu’il vient tout juste d’entendre, il invite la fratrie, Moïse y compris, à se présenter devant lui. Mais avant, le texte lui-même se permet un commentaire sur la grande humilité de Moïse (v. 3), comme pour bien indiquer à ses lecteurs qu’il n’est aucunement coupable de l’orgueil que lui prêtent son frère et sa sœur.
Voilà donc le trio qui se rend à la Tente de la Rencontre. L’affaire est sérieuse puisque le Seigneur prend la peine de convoquer ce qui ressemble fort à une séance de tribunal. Il ne donne cependant pas la parole aux accusés. Son évaluation de la situation est déjà terminée ; il les instruit de leur méprise. Ils ne sauraient se comparer à Moïse puisque ce dernier est le seul à qui il parle face à face (v. 8). Ses manifestations aux prophètes qu’ils sont peut-être passent par la médiation plus obscure du songe et de l’énigme. En clair, fait valoir le Seigneur, son lien avec Moïse est unique et le critiquer équivaut en quelque sorte à commettre un attentat énonciatif intolérable. La colère du Seigneur est la hauteur de l’enjeu de parole soulevé. À défaut de claquer la porte pour bien manifester sa désapprobation, il disparaît avec la colonne de nuée qui exprimait sa présence.
Miryam est désormais blanche comme neige. Sa lèpre témoigne des effets délétères d’une parole infectée sur le corps qui la parle. Aaron devient le regard qui contemple ce témoignage muet. S’il est épargné, c’est peut-être bien parce qu’il lui appartient de retisser les liens que leurs paroles à lui et à sa sœur avaient rompus. C’est donc lui qui implore Moïse, reconnaît leur faute et se met à plaider pour sa sœur. Il atteste ainsi une réalité vitale : les brisures relationnelles peuvent être surmontées. Moïse peut alors jouer son rôle habituel d’intermédiaire auprès du Seigneur.
Le Seigneur ne peut que céder devant la restauration de la solidarité fraternelle, mais non sans ordonner une mise à l’écart temporaire de Miryam. Au bout de ce nombre parfait de jours – sept – sa lèpre blanche disparaît comme neige au soleil. Mais le peuple qui l’attend aura eu le temps de méditer sur cet étonnant duo de témoignages surgi au cœur même d’une expérience négative.
Le repentir de David devant Nathan
2Sm 12,1-14 :
1 Le Seigneur envoya vers David le prophète Nathan qui alla le trouver et lui dit : « Dans une même ville, il y avait deux hommes ; l’un était riche, l’autre était pauvre.
2 Le riche avait des moutons et des bœufs en très grand nombre.
3 Le pauvre n’avait rien qu’une brebis, une toute petite, qu’il avait achetée. Il la nourrissait, et elle grandissait chez lui au milieu de ses fils ; elle mangeait de son pain, buvait de sa coupe, elle dormait dans ses bras : elle était comme sa fille.
4 Un voyageur arriva chez l’homme riche. Pour préparer le repas de son hôte, celui-ci épargna ses moutons et ses bœufs. Il alla prendre la brebis du pauvre, et la prépara pour l’homme qui était arrivé chez lui. »
5 Alors, David s’enflamma d’une grande colère contre cet homme, et dit à Nathan : « Par le Seigneur vivant, l’homme qui a fait cela mérite la mort !
6 Et il remboursera la brebis au quadruple, pour avoir commis une telle action et n’avoir pas épargné le pauvre. »
7 Alors Nathan dit à David : « Cet homme, c’est toi ! Ainsi parle le Seigneur Dieu d’Israël : Je t’ai consacré comme roi d’Israël, je t’ai délivré de la main de Saül, 8 puis je t’ai donné la maison de ton maître, j’ai mis dans tes bras les femmes de ton maître ; je t’ai donné la maison d’Israël et de Juda et, si ce n’est pas assez, j’ajouterai encore autant.
9 Pourquoi donc as-tu méprisé le Seigneur en faisant ce qui est mal à ses yeux ? Tu as frappé par l’épée Ourias le Hittite ; sa femme, tu l’as prise pour femme ; lui, tu l’as fait périr par l’épée des fils d’Ammone.
10 Désormais, l’épée ne s’écartera plus jamais de ta maison, parce que tu m’as méprisé et que tu as pris la femme d’Ourias le Hittite pour qu’elle devienne ta femme.
11 Ainsi parle le Seigneur : De ta propre maison, je ferai surgir contre toi le malheur. Je t’enlèverai tes femmes sous tes yeux et je les donnerai à l’un de tes proches, qui les prendra sous les yeux du soleil.
12 Toi, tu as agi en cachette, mais moi, j’agirai à la face de tout Israël, et à la face du soleil ! »
13 David dit à Nathan : « J’ai péché contre le Seigneur ! » Nathan lui répondit : « Le Seigneur a passé sur ton péché, tu ne mourras pas.
14 Cependant, parce que tu as bafoué le Seigneur, le fils que tu viens d’avoir mourra. »
Vocabulaire :
riche / pauvre : 23 et 24 fois dans l’A.T. c’est la différence majeure entre les hommes
s’enflamma : comme Caïn David est irrité, enflammé
cet homme c’est toi : c’est le cœur et le but de la parabole que David puisse s’identifier à ce riche qui a mal agi et donc péché.
la femme : (ish) soit la femme des origines (que Adam nomme Eve = la vivante)
en cachette / à la face du soleil : cette opposition met en lumière la manière d’agir de Dieu toujours au vu et au su de tous, alors que l’homme pécheur agit en secret.
j’ai péché contre le Seigneur : c’est la prise de conscience de Davird
Questions :
En quoi la parabole racontée par Nathan se rapproche du péché commis par David (adultère avec Bethsabée et meurtre d’Ourias son mari) ?
Pourquoi Nathan utilise une parabole pour dénoncer son péché à David ?
Commentaire :
Comme David a changé ! Celui qui autrefois, en berger, entrait et sortait à la tête de son peuple est maintenant installé dans sa maison, immobile (2S 11,1s), mais manipulant tout le monde autour de lui. Il envoie ses hommes se battre pour lui, il envoie ses serviteurs « prendre » la femme qu’il désire, il envoie chercher Ourias, le mari cocu, pour tenter de cacher son adultère et la grossesse gênante, il renvoie ce dernier se faire tuer à la guerre. Le berger s’est transformé en chasseur, le roi ne cherche plus le bien de son troupeau, mais s’en sert à ses propres fins. Ce qui étonne, dans le récit du péché de David, est le ton neutre qu’emprunte le narrateur pour raconter ces atrocités commises par David, il ne se permet qu’un commentaire à la toute fin : « mais ce qu’avait fait David déplut au Seigneur » (2 S 11,27). Cet homme, c’est toi !
La faute est suivie du procès et de la condamnation. Le procès s’opère par l’apport d’une parabole judiciaire servie par Nathan envoyé du Seigneur, et la condamnation est prononcée par David lui-même. Sa condamnation comporte deux sanctions : la mort de l’homme riche soit David lui-même reportée sur son fils (2S 12,13), et une compensation au quadruple pour la prise de l’agnelle, à travers les malheurs que subira David.
Les reproches et les menaces du prophète Nathan et la confession de David nous en disent long sur la volonté de Dieu de pardonner le pécheur repentant. Si David reconnaît son péché (2 S 12, 13), c’est grâce au prophète qui éveille sa conscience aveuglée par la passion envers la femme d’Ourias (v. 9). Il en est ainsi pour nous qui faisons taire notre conscience devant des gestes répréhensibles où la passion, l’appât du gain et la soif du pouvoir jouent souvent un grand rôle. Ces déviances dénaturent notre conscience et dissolvent notre culpabilité par des justifications psychologiques, économiques et politiques.
David entend le prophète énumérer ses griefs lorsqu’il lui raconte la parabole du pauvre et de sa petite brebis (2 S 12, 1-4). Ces rapprochements avec sa faute engendrent son remords qui se changera en regret.
David : Ps 50,19 : Le sacrifice qui plaît à Dieu, c’est un esprit brisé ; tu ne repousses pas, ô mon Dieu, un coeur brisé et broyé.
Michée : (Za 1,3) : Mais tu leur diras : Ainsi parle le Seigneur de l’univers : Revenez à moi – oracle du Seigneur de l’univers –, et je reviendrai à vous, dit le Seigneur de l’univers.
Ezéchiel : Ez 18,32 : Je ne prends plaisir à la mort de personne, – oracle du Seigneur Dieu – : convertissez-vous, et vous vivrez. »
Joel : Jl 2,12 : Et maintenant – oracle du Seigneur – revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne, les larmes et le deuil !